Société de plantation

Les grandes familles de planteurs

Maison Rouge à Saint-Louis : des Desforges-Boucher à la famille Bénard (1722-1971)
Auteur
Bernard LEVENEUR

Conservateur territorial du patrimoine
Musée Stella Matutina (La Réunion)


Maison Rouge à Saint-Louis : des Desforges-Boucher à la famille Bénard (1722-1971)

Gouverneur de Bourbon de 1715 à 1718, Henri de Justamond autorise en 1716 la chasse entre Saint-Leu et la Rivière Saint-Etienne, ouvrant ainsi la colonisation du Sud. Trois ans plus tard, le 5 mars 1719 , Antoine Desforges-Boucher (v.1681-1725)  obtient la concession du Gol, comprise entre la ravine du même nom à l’est et la ravine des Cafres à l’ouest : c’est la première concession accordée sur le territoire de l’actuelle commune de Saint-Louis. Le 18 juillet 1722, la planèze comprise entre la ravine du Gol à l’ouest et le Bras du Milieu à l’Est, connu également sous le nom de ravine du Mouchoir Gris, est octroyée à son beau-frère, Paul Sicre de Fontbrune, arrivé à Bourbon la même année.

Installé à Saint-Paul, puis affecté à Sainte-Suzanne, il ne peut mettre en valeur sa concession de Saint-Louis. Le 19 mars 1725, elle est rétrocédée à la Compagnie puis de nouveau donnée en concession six jours plus tard à Antoine Desforges-Boucher. Il devient ainsi propriétaire de toutes les terres comprises entre la ravine des Cafres et la ravine du Mouchoir Gris, faisant de lui l’un des plus importants propriétaires fonciers de la colonie.

Maison Rouge et le Gol : une gestion commune
(1725-1783)

Desforges-Boucher meurt le 1er décembre 1725, n’ayant pu mettre en pratique sur ses terres de Saint-Louis, les mesures qu’il tentait d’imposer aux colons concernant la culture du café. Le 4 décembre suivant, ses héritiers procèdent à l’inventaire des biens qu’ils possèdent dans l’île . L’inventaire de l’habitation du « Gaule » est sommaire. Le terrain est estimé avec les terres défrichées et caféiers plantés à 15 000 livres. Sur l’habitation se trouvent 30 esclaves estimés à 28 805 livres. Le cheptel, composé de 100 bœufs, 140 moutons, agneaux, et cabris, et 47 porcs, est estimé à 1713 livres. Soit un total de 45 518 livres, l’équivalent aujourd’hui d’environ 700 000 euros.

Sept ans après cet inventaire, le 16 août 1732, les biens des héritiers Desforges-Boucher sont partagés. Le Gol est divisée en deux habitations : la première s’étend entre la ravine du Maniron à l’ouest au « premier bras de l’étang du Golle » à l’est ; la seconde, débute au « premier bras de l’étang du Golle à l’ouest jusqu’à la ravine de l’étang du Golle à l’est ». Si l’on doit considérer « le premier Bras du Golle » comme étant l’actuelle ravine du Gol et la ravine de l’étang du Gol, comme étant l’actuelle ravine du Mouchoir Gris, ce partage de 1732 donne naissance aux propriétés distinctes du Gol et de Maison Rouge. Elles sont laissées dans l’indivision : parmi les héritiers se trouvent Antoine-Marie et Jacques dont il est fait mention ci−dessous.

En 1735, le recensement général rédigé à la demande de Bertrand François Mahé de La Bourdonnais, peu de temps après son arrivée aux Mascareignes, indique que les héritiers Desforges-Boucher possèdent à Saint-Louis 24 esclaves dont 15 hommes et 9 femmes. 20 000 caféiers sont en rapport. L’habitation produit 500 quintaux de blé (25 t.), 200 de maïs (10,16 t.) et 500 de fayots (25,4 t.).

Planche botanique d’un caféier, milieu du XVIIIe siècle.
Coll. Bernard Leveneur
Maison Rouge, reconstitution d’un champ de café.
2023, photographie Bernard Leveneur

Après leurs périodes de formation en métropole, les frères Desforges-Boucher reviennent aux Mascareignes : Antoine-Marie en 1736 et Jacques en 1749. Le premier, ingénieur militaire en poste à l’île Bourbon puis à l’île de France, effectue une brillante carrière terminant en 1767 gouverneur général des Mascareignes. Il se retire alors à Saint-Louis avant de quitter définitivement la colonie pour Lorient en 1783.

Jacques Desforges-Boucher, ancien officier des vaisseaux de la Compagnie des Indes  , s’installe à Saint-Louis en 1749 où il épouse le 17 octobre 1752 Marie Elisabeth Le Lubois (1729-1808) . Selon son contrat de mariage, Jacques Desforges-Boucher adjoint à son nom la particule de Maison Rouge, à l’origine du nom donné au domaine . De cette union naissent dix enfants dont les neuf premiers à Saint-Louis entre 1753 et 1766. Compte-tenu des responsabilités de son frère aîné, Jacques prend en charge l’immense propriété familiale du Gol et de Maison Rouge.

Les recensements des années 1740-1750 nous livrent des informations sur les productions pratiquées sur les terres appartenant à la famille Desforges-Boucher. En 1744, le domaine du Gol est géré par trois économes . Les terres sont mises en valeur par 146 esclaves et 20 000 caféiers en rapport y sont plantés, soit une récolte annuelle de 209 quintaux de café (10,6 t.). Ces chiffres concernent-ils uniquement le Gol ou comprennent-ils les terres de Maison Rouge ?

Huit ans plus tard, en 1752, un autre recensement permet d’estimer la fortune de Jacques Desforges-Boucher, les biens des deux frères étant évalués séparément. Ce dernier possède à Saint-Louis 99 esclaves, dont 76 adultes, vivant probablement à Maison Rouge. La superficie exploitée du domaine est de 651 arpents (222,56 ha.), où sont plantés 10 000 caféiers en rapport. Cependant, il y existe aussi des plantations de maïs (200 quintaux, 10,16 t.) de blé (100 quintaux, 5,080 t.) et de riz (100 quintaux, 5,080 t.). 250 bœufs, 120 moutons et 100 cochons forment le cheptel.

Ces chiffres peuvent être comparés au recensement de son frère aîné au Gol, propriété placée sous l’autorité d’un économe. Antoine Marie Desforges-Boucher y possède 162 esclaves, dont une population adulte de 129 individus. Son cheptel compte 180 bœufs, 150 moutons et 180 cochons. La récolte de blé s’élève à 180 quintaux (9,14 t.), celle de maïs à 600 quintaux (30,481 t.) et celle de riz à 60 quintaux (3 t.). Enfin, 40 000 caféiers sont en rapport, le tout sur une surface de 836 arpents (285,807 ha.).

Au milieu du XVIIIe siècle, les frères Desforges-Boucher doivent être considérés à juste titre comme les propriétaires les plus importants de Saint-Louis. La maison construite quelques années auparavant (1747) par Antoine Marie à proximité de l’étang, le fameux Château du Gol , témoigne de cette éclatante réussite.

Souvenirs de l’île Bourbon n° 48, Château du Gol. Louis Antoine Roussin. 1848.
Coll. musée Léon Dierx, inv. 1984.07.01.50

Selon Jean Richard , « la vie familiale (de Jacques Desforges-Boucher) tout au long du temps passé à Bourbon n’appelle guère de commentaires : elle connaît des hauts et des bas, liés aux variations climatiques. Dans ses lettres, Antoine Marie n’entretient guère son frère que de questions matérielles et financières, cultures, bétail, fournitures à demander aux magasins de la Compagnie ». Au mois d’août 1767, l’installation définitive d’Antoine Marie au Gol est à l’origine du départ de son frère Jacques pour Lorient, où il se trouve dès le mois de juillet de la même année.

Le 5 février 1767 , selon une lettre d’Antoine Desforges-Boucher, Jacques a vendu son habitation de Maison Rouge à un certain Duclos. Dans une autre lettre, datée du 25 août 1768, Antoine Marie précise : « M. et Mme Boucher (Jacques et son épouse) ont bien fait de vendre et de passer en Europe ; ils périssaient d’ennui dans leurs montagnes ». Cependant, Duclos n’honore pas sa dette et Jacques Desforges-Boucher rentre en possession de Maison Rouge en 1773. La gestion de la propriété est confiée à Taillepied, qualifié de, « meilleur et plus intelligent cultivateur qu’il y ait dans les deux îles » par Antoine-Marie , remplacé après son décès, en 1775, par un commandeur blanc.

Finalement, en 1779, Maison Rouge est louée pour deux années, (8 000 livres par an) à Nicolas Le Meur, ancien chirurgien de marine, installé dans l’île en 1771. Le Meur quitte Bourbon en 1780 et Antoine Marie confie Maison Rouge à Etienne de Saint-Martin , cousin germain d’Antoine Marie et de Jacques, « jusqu’à la fin de la guerre d’indépendance des Etats-Unis, survenue en 1783 » .

En 1783 Antoine Marie Desfroges-Boucher quitte lui aussi définitivement Bourbon pour Lorient. Au mois de décembre 1784, il cède sa propriété du Gol à Antoine François Pascalis et Jean-Baptiste de Lestrac. Ainsi, à la fin de l’Ancien Régime, Maison Rouge, la dernière possession des Desforges-Boucher à Saint-Louis, devient une propriété totalement autonome de celle du Gol.

Maison Rouge et la succession de Jacques Desforges-Boucher (1784-1827)

Le 17 août 1786 Jacques Desforges-Boucber meurt à Lorient, à l’âge de 65 ans . Ses héritiers font procéder à l’inventaire des biens de leur père à Bourbon le 7 octobre 1789 , en présence d’un des leurs, Joseph Jacques François dit « Joson » Desforges-Boucher (1764-vers 1838) qui représente ses sœurs. L’estimation est faite par Antoine François Pascalis, garde-magasin pour le roi à l’Etang-Salé et Grimaud, ancien capitaine au corps des volontaires de Bourbon locataire de l’habitation. On y trouve :

 Une maison principale de pièces couchées ayant un étage, couverte en bardeaux, la couverture, les sablières, les portes et fenêtres dans le plus mauvais état ; un magasin en charpente, couvert en bardeaux, bordé et planchéié haut et bas, dans le plus mauvais état ; un autre magasin en charpente, bordé et couvert en feuilles, encore en très mauvais état et hors d’état de recevoir les graines ; une petite case de bois rond servant de magasin tombant de vétusté ; un poulailler de pièces couchées, couvert en feuilles ; les cases à Noirs dans le plus mauvais état .

115 esclaves vivent sur l’exploitation. Trois parcelles sont cultivées en maïs, une en riz, et il existe aussi « une jeune caférie de trois à quatre ans promettant une bonne récolte ». Mais la succession Desforges-Boucher doit à Grimaud 821 livres pour la mise en valeur de ces champs. « Joson » Desforges-Boucher reste à Bourbon, afin de régler les affaires de la succession, mais plus vraisemblablement en raison des troubles nés de la Révolution française. Habite-t-il alors Maison Rouge ? Le 8 juillet 1795, il épouse à Sainte-Suzanne Geneviève Euphrasie Eléonore Fréon dont il divorce en 1814. Il semble que Joseph Desforges-Boucher quitte définitivement l’île en 1805 .

Au cours des années 1800-1810, les recensements des propriétaires du quartier Saint-Louis constituent actuellement les seules sources disponibles, concernant l’histoire du domaine au début du XIXe siècle. Trois d’entre eux ont été retrouvés correspondant aux années 1805, 1808 et 1811.

Années Esclaves Cultures Suf cultivées (ha.) Récoltes (t.)
 

1805

 

103

Blé 125 12,7
Maïs 5 77,219
Coton 2,4 1,27
Café 1 1,16
 

1807

 

109

Blé 125 12,192
Maïs 5 30,481
Coton 2,4 1
Café 1 1,422
 

1811

 

117

Blé 0,5 Non id.
Maïs 1 Non id.
Coton Non id.
Café 3 Non id.

Ces indications attestent de l’importance de la culture des vivres à Bourbon au XVIIIe siècle, dans le Sud qui constituent l’essentiel des revenus de la famille Desforges-Boucher au début du XIXe siècle. La culture du café a régressé. En 1811, peut être une conséquence des mauvaises conditions climatiques survenues dans la colonie, la propriété semble à l’abandon.

Maison Rouge au XIXe siècle : des Murat aux Hoareau

En 1814, à la veille de la rétrocession de l’île, le recensement des héritiers Desforges-Boucher mentionne que Richard Nairac (1763-1831), alors âgé de 52 ans, est leur représentant à Bourbon. Nairac et son épouse Marianne Barbe de Lanux (1763- 1828) vivent à Saint-Louis depuis 1788.

Progressivement Nairac rachète leurs parts, comme l’atteste la vente à son profit du 11 septembre 1827 par Sophie
Doizon , veuve Delahutte Férat et Virginie Violette veuve Landes de Saint-Palois et épouse Couchoux de « leurs prétentions parts et droits dans une habitation dite de Maison Rouge et ses dépendances située à Saint-Louis ». Il s’est avéré impossible de déterminer avec précision les dates des autres ventes faites par les héritiers de Jacques François Desforges-Boucher au profit de Nairac au début du XIXe siècle. Au début des années 1830, il est le seul propriétaire de Maison Rouge.

Le 21 juillet 1831, Nairac décède à Saint-Louis, laissant cinq héritiers : Anne Marie Lucie Nairac (1769-1868) veuve de Hyacinthe Murat  ; Auguste Baptistine Edite Nairac (1787-?) épouse de Nicolas Seuriot ; Antoinette Sophie Henriette Nairac (1791-?) épouse d’Auguste Baudry ; Paul Émile Henri Nairac (1796-1858) ; Suzanne Marie Anne Nairac (1797-?) épouse de Jean Sénac.

Un inventaire est rédigé le 5 août 1831 et se déroule à Maison Rouge, sur une habitation située à la Ravine Blanche et dans une maison rue Royale à Saint-Pierre. L’inventaire des biens à Maison Rouge laisse apparaître un ensemble très rustique, comparé aux autres propriétés.

Un an plus tard, le 20 août 1832 , les héritiers Nairac se partagent les biens de leur père. Maison Rouge est divisée en quatre bandes de terres parallèles, de la jonction des deux ravines au sommet de montagnes. Elles sont attribuées respectivement à Anne Marie Lucie Murat, Paul Émile Nairac, Henriette Baudry et Suzanne Sénac. Au cours des années 1830, Anne Marie Lucie Murat reconstitue à son profit la totalité de l’habitation, en rachetant les parts de son frère et de ses sœurs. Ces mutations foncières se déroulent dans le contexte de la « mise en sucre » de la colonie durant les quarante premières années du XIXe siècle.

Anne-Marie Lucie Nairac-Murat : la « mise en sucre » de Maison Rouge (1832-1867)

En effet, comme partout ailleurs dans l’île, le territoire de la commune de Saint-Louis se modifie progressivement : les champs de cannes remplacent le café, le coton mais surtout les céréales qui ont fait la richesse du quartier. Consciente des mutations économiques qui s’opèrent, Lucie Murat modifie la configuration des champs de Maison Rouge. Elle est confirmée par la création d’une sucrerie en 1834-1835, dont le financement relève d’une opération financière particulière.

En effet, le 26 novembre 1834 Alphonse Lefebvre, agent de change à Saint-Paul, et Virginie Pillet de Troissy, institutrice, forment une société afin de créer une sucrerie, à Maison Rouge, au pied de la maison principale. Lucie Murat s’engage en contre partie à livrer sa production de cannes. L’investissement industriel n’est donc pas le fait de la propriétaire de Maison Rouge, mais de bailleurs de fonds. Le règlement de la succession Nairac et le rachat des parts de ses frères et sœurs dans Maison Rouge grèvent les finances de Lucie Murat. Le 7 mars 1835 Alphonse Lefebvre et Virginie de Troissy s’engagent à vendre à Lucie Murat, contre 140 milliers de sucres, la sucrerie qu’ils font construire à Maison Rouge. Virginie de Troissy cède ses parts le 30 juin 1837 et les héritiers Lefebvre font de même le 27 mai 1840 . Ce dernier acte de vente contient l’unique description détaillée de la sucrerie de Maison Rouge au XIXe siècle. Elle se compose de quatre bâtiments : « un bâtiment en pierre qui contient une machine à vapeur de quatre chevaux ; un bâtiment en bois servant de sucrerie, contenant une batterie montée à six chaudières en fonte (batterie Adrienne), deux tables à sucre, dix cuillères à sucre, dix écumoires, un baquet doublé en cuivre à deux compartiments ; un bâtiment en bois servant de sucrerie de sirop dans lequel se trouve une batterie montée à une seule chaudière en fonte et une table à sucre ; un bâtiment en bois à étage servant de purgerie contenant 42 formes à sucre (…) tous les bâtiments couverts de bardeaux ». Ces bâtiments industriels se trouvent sur le site actuel du magasin des engrais, construction du début des années 1950.

Maison Rouge, ancien magasin des engrais, photographie 2023. Photographie Bernard Leveneur.
Au premier les murets en ruines et les deux flamboyants occupent le site de l’ancien moulin de la sucrerie.

Les recensements annuels des propriétaires durant la première moitié du XIXe siècle ne contiennent aucune information sur les productions récoltées à Maison Rouge. Seuls les esclaves sont recensés, et parfois le cheptel. Ainsi, de 1835  à 1848, le nombre d’esclaves passe de 118 à 217, soit une augmentation de 89 individus. La majorité d’entre eux sont créoles, c’est-à-dire nés dans l’île, les Noirs de pioche, formant l’essentiel du groupe. Toutefois, il existe également des Noirs à talents, comme en 1842, Auguste, 26 ans, créole, chef de pompe, David, 33 ans, créole, chef sucrier.

Il est probable que la maison de maître de Maison Rouge soit l’œuvre de la famille Murat, remplaçant la maison des Desforges-Boucher. La façade écran, typologie introduite dans l’architecture créole durant les années 1830, avec sa varangue à arcades en plein centre et ses fenêtres à imposte, relève de l’influence de l’architecture néoclassique de la première moitié du XIXe siècle qui se développe à Bourbon durant cette période.

Relevé de la façade sud de la maison de maître, années 1830 ?.
Coll. DAC de La Réunion, relevé SADP 1987.

La famille Hoarau à Maison Rouge (1867-1897)

De 1850 à 1863, l’économie sucrière réunionnaise atteint son apogée. A partir de 1863, une grave crise économique s’installe dans la colonie. La famille Murat n’échappe pas au marasme qui s’installe dans l’île. Le 1er mars 1864  Lucie Murat et son fils, Hyacinthe Murat, hypothèquent le domaine au profit du négociant dionysien Jean-Baptiste Pruche-Aubry contre la somme de 190 000 francs. Le 24 janvier 1865 une nouvelle hypothèque s’ajoute à la précédente au profit cette fois-ci du Crédit Foncier Colonial, organisme de prêt installé dans l’île .
Le non-paiement des échéances par la famille Murat entraîne leur expropriation, demandée par le Crédit Foncier Colonial. Elle intervient le 12 mai 1867 au profit de Dominique Edevin Hoarau père (1815-1885), qui rachète le domaine pour le prix de 560 000 francs.

La description notariale est succincte. 279 engagés, dont « 194 hommes au-dessus de 16 ans », vivent dans le camp de Maison Rouge, leurs contrats étant cédés à Hoarau. Dans la vente sont compris, « une maison de maître à étage, divers pavillons grands et petits, cuisines, divers magasins, étables, pigeonnier, remise, atelier de charroi, bâtiment servant de forge, écuries, bâtiment où se trouve l’installation pour la fabrication du sucre, bâtiment construit pour le moulin à cannes, citerne à sirop, deux hangars à bagasse, cases et cabanons de domestiques et engagés ». Le matériel de l’usine se compose de « une machine de six chevaux de Desronne et Cail, faisant marcher les turbines, une machine de Fawcett de six chevaux faisant aller le moulin à cannes et les basses températures, un générateur de 40 chevaux, une batterie Gimard, composée de sept chaudières en cuivre, quatorze tables en bois, cinq turbines, cinq basses températures, deux défécateurs pour les écumes ». Le cheptel comporte 42 mules, 10 porcs et 20 moutons. 16 charrettes à cannes, 5 charrettes à paille et 3 tombereaux forment le matériel de transport. La mention d’un moulin à maïs et d’un ventilateur pour le café laisse supposer des plantations de vivres et un reliquat de café.

Né à Saint-Louis le 3 janvier 1815, Dominique Edevin Hoarau est le fils de Vilfride Elécy Hoarau (1793-1837), propriétaire terrien, et de Louise Lucine Mondon (1802-1841). Son père est le petit-fils d’un ancien major commandant la Garde nationale de Saint-Louis en 1794, et la famille de sa mère appartient à la petite bourgeoisie commerçante de la ville. Le 24 janvier 1844, il épouse à Saint-Louis Marie-Anne Zénithe Hibon (1783-1858), veuve en premières noces de Henri Michel Lossandière (1785-1842) . Le couple Hoarau-Hibon n’a pas eu de descendance.

Cette première union lui ouvre les portes de « l’aristocratie sucrière » de l’arrondissement au vent. En effet, la famille Hibon possède à Saint-Leu et aux Avirons plusieurs habitations importantes. Il en est de même pour les Lossandière. En 1842, à la mort de son premier époux, Marie Anne Hibon hérite de plusieurs terrains à Saint-Leu. Le décès de son père Jean Zénon Hibon en 1845 fait d’elle une riche héritière. Ainsi, en 1867, Dominique Edevin Hoarau rachète Maison Rouge grâce à la fortune que lui laisse sa femme, décédée le 18 janvier 1858 à Saint−Louis.

Six ans plus tard, le 26 avril 1864, Dominique Edevin Hoarau épouse en secondes noces Anatholie Leperlier (1839-1906), dite « Marie Ernestine », fille de Gabriel Duclesmur Leperlier (1800-1867) et de Marie Sabine Hoarau (1802-1843). De cette union naissent six enfants : Dominique Edevin fils, Marie Lucina Ernestine épouse de Michel Brun, Berthe épouse de Victor
Fourcade , Louis Ely, Marie Mathilde et Ernestina épouse d’Henri Gonthtier.

Propriétaire de Maison Rouge de 1867 à 1885, Dominique Edevin Hoarau procède au remembrement de plusieurs parcelles situées à proximité : terrain de l’Éperon (30 ha environ), acquis en 1870 de Anne-Marie Lucie Nairac veuve Murat ; terrain de Roches Maigres (onze terrains, 119 hectares) acheté le 10 août 1871 à Amédée Patu de Rosemont .

Ces achats sont complétés par plusieurs acquisitions dans la même région au cours des années 1880. Les acquisitions faites sur la rive sud de la Ravine du Mouchoir Gris amènent la création, vers 1870-1880, d’un téléphérique entre les deux versants de ce cours d’eau, permettant ainsi d’acheminer à la sucrerie de Maison Rouge les cannes à sucre plantées sur les hauteurs de Roches Maigres.

Maison Rouge (357 ha), l’Eperon (30 hectares) et Roches Maigres (119 hectares) forment alors une propriété de plus de 500 hectares à Saint-Louis. Le patrimoine foncier de la famille Hoarau ne se limite pas aux seuls terrains de Maison Rouge et de Roches Maigres. Il convient d’ajouter plusieurs autres terrains au Gol et à l’Étang-Salé. Hoarau est devenu au début des années 1870 l’un des notables du Sud, dont l’appétit foncier, certes plus modeste, peut-être comparé aux ambitions des familles de K/véguen ou Choppy, au cours de la même période.

Dominique Edevin Hoarau meurt à Maison Rouge le 21 août 1885. Ses biens, indivis de 1885 à 1891, sont administrés par Dominique Edevin Hoarau fils. En 1891, ce dernier rachète Maison Rouge et ses dépendances. Selon une tradition orale familiale, c’est Fernand Inard , qui lui avance les 500 000 francs nécessaires. Maison Rouge comporte 357 hectares de superficie dont 23 en forêts, 3 hectares pour l’emplacement de l’usine et ses dépendances, 24 ares en pâturages, le reste étant cultivé en caféiers, cannes à sucre et céréales. La sucrerie est toujours en activité.

Dominique Edevin Hoarau fils, vers 1885.
Coll. Kerbidy-Hoarau
Site de Maison Rouge vers 1890.
Coll. Catherine Lavaux.

La famille Hoarau est probablement à l’origine de la physionomie des bâtiments autour de la maison principale, sans qu’il soit possible de l’affirmer. A l’ouest de la résidence un pavillon sert de salle à manger compléter dans une arrière-cour de magasins et d’une cuisine. A l’est un pavillon secondaire doté d’une entrée indépendante permet de loger d’autres membres de la famille.

Relevés des façades sud de la maison de maître, de la salle à manger et du pavillon annexe.
Coll. DAC de La Réunion, relevé SADP 1987.
Plan masse de la maison et de ses dépendances à la fin du XIXe siècle.
Coll. DAC de La Réunion, relevé SADP 1987.

Cinq ans plus tard, le 5 avril 1896, le domaine est cédé à Charles Martin, demeurant à Saint-Denis. Le montant de la transaction, 150 000 francs, laisse supposer qu’il s’agit d’une vente faite pour faire face aux différentes inscriptions hypothécaires qui grèvent le domaine. Un an plus tard, Martin ne s’est toujours pas acquitté des 150 000 francs et cède le domaine à Fernand Albert Inard le 15 mars 1897. Il est probable que la sucrerie cesse de fonctionner peu de temps après, les cannes à sucre de Maison Rouge étant alors transportée vers l’usine du Gol  ou celle de La Rivière ou La Chapelle à Saint−Louis .

Maison Rouge durant la première moitié du XXe siècle

De 1897 à 1971, Maison Rouge  appartient à Fernand Inard puis à sa fille Fernande, épouse de Léonus Bénard, planteur, industriel et homme politique important durant la première moitié du XXe siècle à La Réunion. Dans toute l’histoire de Maison Rouge, ces deux noms, Inard et Bénard, sont les plus souvent cités dans la mémoire collective.

Né le 9 septembre 1860, Fernand Albert Inard (1860-1931) est l’arrière-petit-fils de Mathurin Inard (1761-1828), gérant de Maison Rouge en 1805 pour le compte de la famille Desforges-Boucher.

Son père, Ernest Inard (1833-1875), appartient à la petite bourgeoisie de Saint-Pierre, où il exerce la profession de commis négociant en 1867, puis celle de secrétaire de police au moment de son décès. Sa mère, Adèle Ambulan (v 1827- ?), descendante d’une libre de couleur, est couturière. Fernand Inard et ses trois sœurs  sont reconnus officiellement lors du mariage de leurs parents à Saint-Pierre le 24 août 1867.

Fernand Inard épouse en 1885 Marie Eglantine Leperlier (1861-1908), fille d’un propriétaire terrien de la Ravine des Cabris, Duclesmur Leperlier (1832-1909). Ce mariage permet l’alliance avec la famille de Dominique Edevin Hoarau père, l’un des oncles de son épouse. De cette union naissent trois filles : Fernande (1887-1971), épouse de l’homme d’affaire et industriel Léonus Bénard ; Lélia, épouse du magistrat Joseph Barquisseau et Marcelle (1894-1924) épouse du pharmacien Auguste Langlois.

Selon la tradition familiale, Fernand Inard s’enrichit dans le négoce du tabac, culture importante à Saint-Louis à la fin du XIXe siècle. En 1897, il s’installe à Maison Rouge. Ses biens s’étendent sur les territoires des communes de Saint-Louis et de Saint-Pierre. Notable, Inard représente au début du XXe siècle, la commune de Saint-Louis au Conseil général. Le 30 mai 1917 Inard fait don de la propriété de Maison Rouge et de ses annexes à sa fille Fernande épouse de Léonus Bénard (1882-1952). Il se réserve cependant l’usufruit de la maison de maître, de ses dépendances, et du verger.

Fernande Inard et son époux Léonus Bénard, vers 1920.
Coll. Gosselin

Cette donation conforte la fortune de son gendre, associé dès 1907 aux affaires de son beau-père. En effet cette année-là, Fernand Inard, Léonus Bénard et de nombreux planteurs de Saint-Louis et de Saint-Pierre rachètent à Germain Pradel le domaine et l’usine de Pierrefonds, fermée depuis 1895. La « Société des Planteurs de Pierrefonds » rénove la sucrerie, remise en activité lors de la campagne sucrière de 1907- 1908. Dissoute en 1910, la « Société des Planteurs de Pierrefonds » est vendue à Fernand Inard (318 actions), à Jules Elysée (218 actions) et Léonus Bénard (118 actions), Alfred Aubry (118 actions) et Mme Eugène Murat, née Aubry (118 actions) qui forment alors la « Société de Pierrefonds ». Durant les années 1910, Léonus Bénard rachète progressivement les parts de ses associés et devient l’unique propriétaire de Pierrefonds.

Ainsi, en 1917, avec Maison Rouge et Pierrefonds, les époux Bénard possèdent deux des plus belles propriétés du Sud, à l’origine de leur fortune. Celle-ci est confortée après la Première Guerre mondiale par la remontée des cours du sucre. En 1922, à la suite du démembrement des propriétés de la famille K/véguen par la Compagnie foncière Maurice-Réunion, Léonus Bénard accroît considérablement son emprise foncière dans le Sud. A Saint-Louis, il rachète le domaine du Gol (y compris ses annexes de l’Étang-Salé) et les domaines de Bel Air et de La Rivière/ La Chapelle (Les Cocos aujourd’hui). A Saint-Pierre, il entre en possession des plusieurs parcelles importantes, à la Ravine des Cabris et aux Casernes.

Dans ce vaste empire agro-industriel de plusieurs centaines d’hectares entre l’Étang-Salé et le Tampon, doté de trois sucreries , Maison Rouge a un statut particulier. La propriété, considérée comme le bien personnel de Fernande Bénard, ne sera jamais intégrée à la gestion commune des propriétés de son mari dans le Sud. Cette identité propre est renforcée par la création le 9 juin 1966, d’une société baptisée « Société civile de Maison Rouge ».

Résidant à Pierrefonds, Fernande Bénard confie Maison Rouge à des gérants, dont Adrien Grondin de 1926 à 1960. Il dirige le domaine s’assurant de la comptabilité générale, de la paye des ouvriers, de la gestion des stocks, du cheptel et des récoltes de cannes à sucre, de maïs, de cacahuètes ou de manioc, principales productions de Maison Rouge au milieu du XXe siècle. C’est à Maison Rouge également qu’arrivent les productions (essence de géranium et bois de la forêt) de Bon Accueil, nom de la partie haute de la propriété, au lieu-dit les Makes. Des photographies du site, conservées par son fils Alain, témoignent de la vie quotidienne et du cadre de vie des ouvriers et autres habitants de Maison Rouge durant ces 44 années.

La cour de ferme est précédée au sud, du côté de la ville de Saint-Louis, d’une dizaine de maison en bois abritant les familles d’ouvriers agricoles : c’est le village de « La Cour », le camp originel de la propriété. Derrière le parc, au nord de la maison, sur le site baptisé « La Barrière », un second groupe de maisons abrite des colons travaillant les terres de Maison Rouge.

Vue aérienne du site de Maison Rouge en 1950.
Coll. IGN.

Au pied de la maison, baptisée le « château », plusieurs constructions entourent l’esplanade formant une cour de ferme. A l’est, des magasins en bois recouverts de bardeaux longent la cour du côté de la ravine du Mouchoir Gris. Là se trouvent un atelier de charron, un magasin pour le stockage des carburants et un magasin pour les vivres et autres céréales produites sur le domaine. Seul subsiste aujourd’hui l’ancien logement du comptable. Dans leur prolongement se trouve la maison de la famille Grondin, détruite par un incendie au début des années 1990. En contre-bas de ce logis, un bâtiment en « U », construit en maçonnerie, sert d’écuries pour les nombreux mulets et mules, utilisés pour le transport des cannes vers la sucrerie du Gol. A côté, se trouve une bergerie en bois. A l’opposé des argamasses, dans la partie ouest de la cour, un grand bâtiment en
bois , construit sur un soubassement en maçonnerie, fait office de bureau. Dans son prolongement se trouve une grande étable en maçonnerie , précédée d’une imposante fosse à fumier. Derrière l’étable, la vaste esplanade en pente douce fait également office dans les années 1930-1940 de terrain de football.

Diverses cases sont réparties sur le domaine, destinées à loger les gardiens de Maison Rouge : à l’entrée de la propriété, sous le grand tamarinier toujours visible non loin de la ravine du Gol ; dans le parc ; à l’extrémité du chemin Jacques, non loin de la route Hubert-Delisle. Le contrôle des entées du domaine est essentiel au maintien de l’ordre à Maison Rouge.

La maison de maître n’est pas occupée toute l’année, mais fait l’objet d’un entretien régulier. Chaque visite de Fernande Bénard est précédée d’une armada de domestiques, notamment de cuisiniers dont la première tâche est de faire reluire les ustensiles en cuivre de la cuisine. Deux Indiennes sont affectées spécialement aux travaux de peinture sur la façade de la maison.

Le jardin d’agrément qui précède la demeure est divisé en deux parties : à la base de grands benjoins forment un écran végétal. Sur la terrasse haute au pied de la maison et du pavillon d’hôtes, des rosiers sont plantés dans les parterres, ornés aussi, dans les années 1930-1940, d’œillets d’Inde et de dahlias. Des haies « d’orangines » et de « médaillons » (arbustes à feuilles blanches et vertes), régulièrement taillées, soulignent les allées, les parterres ou les bassins. Devant la salle à manger un grand bassin circulaire fait office de vivier pour la famille Bénard.

Femme posant dans l’allée conduisant à la maison principale, vers 1960.
Coll. Gosselin
Façade nord (arrière) de la maison principale, vers 1960.
Coll. ADR, série 2 Fi

La varangue au rez-de-chaussée de la maison principale est réservée à l’apparat. Deux autres varangues plus profondes, entre la maison et la salle à manger, et celle devant la salle à manger, sont les véritables lieux de repos de la famille Bénard. A l’arrière de la maison et sur le côté nord, plusieurs pavillons, dont une cuisine avec un four en maçonnerie, forment les dépendances de la maison. Derrière la maison s’étend un vaste verger planté principalement de letchis et de manguiers. Il y existe quatre grandes allées, toutes bordées elles aussi à l’origine d’orangines taillées.

Varangue de la maison principale, vers 1960.
Coll. Gosselin
Varangue devant le pavillon de la salle à manger, vers 1960.
Coll. Gosselin.

La mort de Fernande Bénard en 1971 et la crise de l’économie sucrière qui frappe l’île durant les années 1970, marquent la fin de la période faste de Maison Rouge. En 1975, la société civile de Maison Rouge cède à la S.E.D.R.E. la partie basse et inculte du domaine, autrefois zone de pâturages pour le cheptel (zébus et mules), afin de créer des logements sociaux, comme ceux qui existent déjà aux abords des ravines du Gol et du Mouchoir Gris. Cependant, le projet est abandonné́ et en 1979 le Département de La Réunion fait l’acquisition de ces 40 hectares de savanes. Deux ans plus tard le 21 décembre 1981, le terrain est vendu à la commune de Saint-Louis. Afin de préserver ce témoignage historique du paysage Saint-Louisien, cette partie de l’ancien domaine de Maison Rouge est alors inscrite au plan d’occupation des sols en espace boisé classé. On envisage alors d’y replanter une forêt, reconstituée à partir des descriptions des voyageurs du XVIIIe siècle.

Le 29 octobre 1982, la Société civile de Maison Rouge cède la partie haute du domaine, soit 348 hectares, à la S.A.F.E.R. qui procède au lotissement de la propriété au profit de petits planteurs. Maison Rouge n’est définitivement plus un grand domaine sucrier. Ne sachant que faire de la partie haute de la savane, de la cour des argamasses, de la maison de maître et de son parc, des dépendances domestiques et agricoles, des vestiges des écuries et étables, la même société cède les 20 février et 2 mars 1987 cet ensemble architectural unique à la commune de Saint-Louis dans la perspective de la création d’un musée d’arts décoratifs.

 

Chronologie des propriétaires

1664 : Compagnie des Indes
1722 : Paul Sicre de Fontbrune
Mars 1725 : Compagnie des Indes
Mars 1725 : Antoine Desforges-Boucher
Décembre 1725 : Héritiers Desforges-Boucher
1767 : Duclos
1773 : Jacques Desforges-Boucher
1788 : Héritiers de Jacques Desforges-Boucher
1827 : Richard Henri Nairac
1831 : Héritiers Nairac
1832-1834 : Lucie Nairac veuve Murat
1867 : Dominique Edevin Hoarau père
1891 : Dominique Edevin Hoarau fils
1896 : Charles Martin
1897 : Fernand Inard
1917 : Fernande Adèle Inard épouse de Léonus Bénard
1966 : Société civile de Maison Rouge

Notes
[1] ADR, C° 1923 F° 61.
[2] Employé de la Compagnie des Indes à Bourbon de 1702 à 1708, Desforges-Boucher est de nouveau dans l'île à partir de 1718, où il exerce les fonctions de directeur du commerce puis de gouverneur de 1723 à sa mort, survenue à Saint-Paul le 1er décembre 1725. Il est le promoteur de la culture du café à Bourbon, première grande culture spéculative de l’'île, imposant dès 1718 la culture de 10 caféiers par tête d'esclave.
[3] ADR 3E46, succession Desforges-Boucher.
[4] Richard, Jean, Les Desforges boucher. Chroniques familiales, 1979-1981, manuscrit inédit. La plupart des renseignements biographiques sur Jacques proviennent de ce document conservé par les descendants Desforges-Boucher. Sa carrière dans la marine marchande se déroule de 1735 à 1749. Il effectue dans l'océan Indien sept campagnes.
[5] Née à Bayonne, elle est venue seule de France, elle rejoint dans l'île son frère, Julien Le Lubois.
[6] Il s'octroie ce titre de noblesse à Bourbon, mais ne l'utilise pas à Lorient.
[7] Econome est peut-être ici à interpréter comme gérant de culture ou gestionnaire de la propriété.
[8] En 1755, Antoine Marie Desforges Boucher rachète les parts de ses co-héritiers dans l'habitation du Gol Il devient ainsi l'unique propriétaire du domaine. Le “ Château du Gol ” était situé sur l'emplacement actuel de la station d'épuration de Saint-Louis, comme l'attestent les fondations dégagées lors de la réalisation de cet équipement.
[9] Richard, p. 108. Toujours selon le même auteur, de 1761 à 1764, Jacques François séjourne en métropole, période qui correspond à la Guerre de Sept ans.
[10] Ibidem, p. 109, lettre d'Antoine Marie Desforges-Boucher.
[11] Ibidem, p 110.
[12] Etienne de Saint-Martin, écuyer, subrécargue, puis gendarme de la garde ordinaire du roi, est né à Port Bourbon (Ile de France), le 8 décembre 1729. Il est le fils de Didier de Saint-Martin (1698-1777), gouverneur de Bourbon de 1743 à 1748 et de Michèle Duhamel (v 1708-1778), tous deux beau-frère et belle-sœur d'Antoine Marie Desforges-Boucher.
[13] Le 4 juillet 1775, les colonies anglaises d'Amérique du Nord proclament leur indépendance. La France s'engage à leur coté de 1778 à 1783. Le conflit se prolonge dans l'océan Indien.
[14] Vingt ans plus tard, le 21 octobre 1808, Elisabeth Le Lublois meurt également à Lorient.
[15] ADR 3E1530.
[16] Renseignement communiqué par M. Nicolas Sicre de Fontbrune. Il est dans l'océan Indien depuis 1784, au Cap puis à I'Ile de France. C'est en 1794 qu'il s'installe définitivement à Bourbon.
[17] ADR, hypothèque de Saint-Denis, vol. 27 n° 3062. Sophie Doizon est la fille de Pierre André Doizon et de Julie Louise Desforges-Boucher. Il s'agit de la petite-fille de Jacques François Desforges-Boucher. Virginie Violette est la seconde épouse de Joseph Gaspard Landes de Saint-Palois, lui-même veuf en premières noces de Julie Constance Doizon. Cette dernière est aussi la petite-fille de Jacques François Desforges-Boucher.
[18] Hyacinthe Murat, originaire de Marseille, s'installe à Bourbon au mois de novembre 1807 et ouvre à Saint-Denis un commerce, rue La Bourdonnais. Le 18 juillet 1814, âgé de 45 ans, il épouse à Saint-Louis Anne-Marie Lucie Nairac de 17 ans sa cadette. De cette union naissent trois fils Hyacinthe (1815-1879), Jules (1817-1894) et Albert (1820-1880) et une fille Juliette (1819-1827).
[19] ADR 3E 1407.
[20] Les recensements des propriétaires de Saint-Louis avant 1835 n'existent plus.
[21] ADR 3E 855.
[22] L’acte passé chez maître Le Brun n’est pas conservé.
[23] De cette première union naissent au moins trois enfants : Amélie, épouse d’Abel Hibon, Guillaume et Pierre Alaüs.
[24] Il s'agit des parents de Georges Fourcade (1884-1962), le célèbre chansonnier créole.
[25] Ancien terrain d’AIbin Ozoux (1828-1889) époux de Léontine Murat (1845-1876), fille de Jules Murat (1817-1894) et petite-fille de Lucie Nairac veuve Murat. Les terrains de Roches Maigres, vendus à Patu de Rosemont formaient l'un des lots du domaine de Bois de Nèfles, connu plus tard sous le nom de Larrée. Ce domaine sucrier, sur lequel existe une usine, appartenait aux fils de Anne-Marie Lucie Murat, Jules et Hyacinthe fils (1815-1879). La complexité de l'indivision amène les époux Ozoux à demander le partage des biens de la famille Murat, à l'origine de la division de la propriété de Bois de Nèfles en 1867.
[26] Dominique Edevin Haorau fils est le cousin germain d’Églantine Leperlier (1861-1908) épouse de Fernand Inard. La mère du premier, Anatholie Leperlier (1839-1906) et le père de la seconde, Duclesmur Leperlier (1832-1909) étaient frère et soeur, enfants de Gabriel Duclesmur Leperlier (1800-1867).
[27] Le Gol appartient à la fin du XIXe siècle aux héritiers Chabrier. En 1905, la propriété est rachetée par la Société Robert Le Coat de K/véguen.
[28] La sucrerie de La Rivière, située au coeur de la Plaine de Bois de Nèfles-Cocos, appartient à la famille Le Coat de K/véguen. Elle cesse de fonctionner vers 1906-1908 après la mise en place d'une voie ferrée la reliant au Gol.
[29] Cette dernière partie a été écrite grâce à l’aide d’Alain et Maria Grondin, que je remercie vivement pour leur accueil et leurs précieux renseignements.
[30] Il s'agit de Mélanie Inard, née le 11 mars 1853, épouse d’Henry Alezan, Marie-Blanche Inard, née le 7 mai 1856, épouse de Julien Alezan et de Marie Angélina Inard, née le 5 décembre 1863.
[31] Pierrefonds, Les Casernes et Le Gol.
[32] Détruit en 1989 par le cyclone Firinga, seul subsiste le soubassement en maçonnerie aujourd’hui.
[33] Site actuel du musée des Arts décoratifs de l’océan Indien (MADOI).
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Société de plantationLes grandes familles de planteurs
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Auteur
Bernard LEVENEUR

Conservateur territorial du patrimoine
Musée Stella Matutina (La Réunion)